17/11/2014

Le regard de Martine Besset sur « La guerre des rires n’aura pas lieu »

           Ce texte mêle la petite histoire à la grande, et faisant la part belle à la première, prouve bien que la mémoire ne fonctionne  qu’à l’ échelle humaine, et, sélective, préfère retenir la peur délicieuse d’un fou rire, et les détails du lieu qui en fut le cadre, plutôt qu’une guerre fratricide, évoquée en une courte phrase finale…Il témoigne aussi qu’un souvenir, aussi précis et vivant soit-il, est avant tout le récit d’un souvenir, et que les mots fixent pour un temps sa forme changeante.
           J’ai pensé en le lisant au " Nom de la rose ", d’Umberto Eco. Le bibliothécaire de l’abbaye a empoisonné les pages d’un livre d’Aristote sur le rire, car " le rire distrait le vilain de la peur du diable. Mais la loi s’impose à travers la peur, dont le vrai nom est la crainte de Dieu. Et de ce livre pourrait partir l’étincelle luciférienne qui allumerait dans le monde entier un nouvel incendie: et on désignerait le rire comme l’art nouveau, inconnu même de Prométhée, qui anéantit la peur."
           Les enfants du temple de Belfast parviennent à réprimer leur envie de rire: est-ce  la crainte de Dieu qui a étouffé l’incendie naissant? Malgré leur jeune âge, le surmoi protestant a-t-il déjà eu raison de leur spontanéité et de leur goût de la gaieté? Et l’esprit de sérieux, corsetant la liberté de penser, permis que naisse et dure la guerre?

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